La mésentente entre les États du Maghreb, l'influence européenne grandissante en matière de lutte contre l'immigration et l'effet de loupe provoqué par le traitement médiatique des migrations subsahariennes ont fait passer au second plan la visibilité des circulations migratoires intra-maghrébines contemporaines dont on a du mal à prendre la mesure. De fait, les circulations horizontales intra-maghrébines, pourtant bien réelles, tendent à être invisibilisées en raison de la surexposition médiatique et sécuritaire des circulations verticales subsahariennes.
Si le droit de quitter son propre pays est toujours affirmé bien que parfois encore difficile à réaliser, le droit d'entrer dans un autre pays que le sien n'existe toujours nulle part. Encore moins le droit de séjourner librement dans le pays de son choix. C'est qu'en effet, la mondialisation a, d'une certaine manière, contribué à rendre suspecte, de plein droit, la présence de l'étranger sur le territoire de l'Etat national. Rares sont les Etats dans le monde qui échappent à ce phénomène de stigmatisation de l'étranger. Les Etats du pourtour méditerranéen ne font pas exception : ceux du littoral nord n'ont eu de cesse, dans le cadre de l'Union européenne, d'élever une « muraille juridique » destinée à maintenir les étrangers à distance respectable. Par effet de dominos et après quelque résistance souvent de façade, les Etats du littoral sud épousent la même logique et acceptent que leur territoire tienne le rôle de « douves » de la forteresse. C'est notamment le cas des Etats du Maghreb qui se dotent de législations répressives. L'Algérie, qui a longtemps opposé une fin de non recevoir aux sollicitations européennes, a fini par adopter, le 25 juin 2008, une telle législation dont la sévérité s'explique par le contexte géopolitique de son édiction et par le recours aux réflexes sécuritaires qu'inspire toujours et partout la présence de l'étranger sur le territoire de l'Etat national.